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Barroso fait son euroshow à l'AssembléeLe président de la Commission a enthousiasmé la droite et étonné la gauche.Un numéro, ce Barroso.
Hier, le président de la Commission européenne a fait un véritable show à l'Assemblée nationale où il était accueilli pour la première fois.
Séduisant parfois, provocant souvent, convaincant rarement, il avait prévenu son monde. Accueilli pour déjeuner à la présidence de l'Assemblée en compagnie des huiles gouvernementales et parlementaires, José Manuel Durrao Barroso glisse à son voisin de table, le socialiste Jean-Marc Ayrault : «J'aime les joutes politiques.»
Il en fera la démonstration quelques heures plus tard face à des parlementaires tentés, eux, de rejouer, pour un temps, la campagne référendaire.
Lorsqu'il entre dans l'hémicycle, peu avant 15 heures, les députés font le minimum protocolaire : ils l'applaudissent mollement. Une heure plus tard, c'est debout que toute la droite l'acclame.
A tel point qu'après-coup son hôte, Jean-Louis Debré, siffle : «On attendait un technocrate, on a eu un politique. Nous n'avions jamais eu auparavant un aussi bon débat européen.»
La gauche, elle, reconnaît, à l'instar d'Ayrault, la qualité de l'homme politique : «On lui parle franchement. Il répond franchement. Cela reste un homme de droite, libéral. D'ailleurs, il a été favorable à la guerre en Irak.» Plus sévère, Arnaud Montebourg juge que l'ex-Premier ministre portugais «défend le marché roi avec le sourire patelin d'un représentant de commerce».
«Mélancolie». Le député PCF de la Somme, Maxime Gremetz, lui, n'a pas envie de rire. A ses yeux, Barroso a «nié le suffrage universel et l'intelligence des Français en nous faisant la leçon. Je ne l'admets pas. Il n'a pas répondu à des questions de parlementaires français, il a tenu un meeting». La faute à qui ? A Gremetz, justement. C'est lui qui a provoqué les premiers incidents de séance. Une agression qui a choqué tous les parlementaires, à commencer par les communistes, soucieux de l'étiquette républicaine et du respect dû à un hôte du rang de chef d'Etat. Contrairement à sa réputation de technocrate, Barroso a saisi la balle au bond. Parfaitement maître des subtilités de la politique hexagonale comme de la langue , il a moqué «la mélancolie» française.
«Je me demande si le pays de Molière ne céderait pas à la tentation du malade imaginaire», s'est-il interrogé. Puis, flattant l'orgueil hexagonal, il s'est lancé dans une ode à la construction européenne en saluant «les éclatantes réussites mondiales qui doivent tant à l'initiative française, comme Airbus et Ariane».
Chantre de «l'économie sociale de marché», Barroso s'est même permis de faire remarquer aux députés PCF que «ce n'est pas avec des discours contre les entreprises (qu'ils) allaient créer de la croissance et des emplois». Debout, la droite s'était trouvée, une heure durant, un nouvel héros.
(Libération- 25.1)bventana